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yeux, affectait de dormir, jouait l’indifférence et l’ennui, si ses paupières s’ouvraient à l’improviste, elle était sûre de trouver le regard anxieux, le regard inquiet, le regard mélancolique de Denis attaché sur sa personne…

Et Denis se demandait à cet instant, voyant que Geneviève se rembrunissait : « Sortirons-nous jamais de cette impasse ? »

Alors il s’empara de Pierre, lourd poupard bien membré qui commençait à faire « grand garçon » ; le prit sur son genou, le projeta en l’air dans un triple galop.

— Que Monsieur veuille bien remettre Pierre sur la banquette. Il faut qu’il apprenne à bien se tenir en voyage.

— Mais, mademoiselle Hedwige, nous avons la chance d’être seuls dans le compartiment, nous pouvons en profiter.

— C’est pour le principe, Monsieur. Un enfant doit s’accoutumer à voyager sans que les grandes personnes s’occupent de lui.

Rousselière dont le sang était vif mourait d’envie de faire une scène à Mademoiselle. Mais il craignit de contrarier Geneviève. Il ne l’avait que trop abreuvée de chagrin jusqu’ici. Le temps était venu de faire pénitence. Et il remit l’enfant à sa geôlière. Mais il ne put s’empêcher de quêter là-dessus le regard de sa femme. À cette minute, sur les lèvres de chacun d’eux flotta l’ombre d’une pauvre sourire bien hésitant, bien fugace, à peine perceptible, mais qui était leur première entente depuis la nuit cruelle.

Tous deux commençaient à trouver Mademoiselle insupportable.

Dans une solitude verte de sous-bois, l’hôtel, qui était une ancienne gentilhommière du dix-huitième siècle, dressait sa façade pierre gris tour-