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devenaient des oracles pour lui. Combien une grossière et banale infidélité eût été moins cruelle à Geneviève !

— Seigneur ! disait-elle à Dieu, s’exaltant dans sa douleur, vous êtes témoin que par toute ma vie laborieuse, appliquée à bien faire, scrupuleuse même, je n’avais pas mérité cela !

Ainsi son orgueil offensé avec son amour se lamentait-il et se tordait-il dans ces heures ténébreuses où l’on ne peut trouver de réconfort que dans les sérénités hélas ! bien éloignées d’elle en ce moment, — du plan surnaturel.

Elle fut livrée à elle-même toute la nuit. On la laissa se débattre dans ce premier grand duel qu’elle eût eu jamais avec une intolérable épreuve. Elle goûta vraiment l’horreur du désespoir aux côtés de ce compagnon comme insensible et que, à sa respiration, elle devinait éveillé. Cela dura jusqu’aux blancheurs d’une aube hâtive de juin. C’est seulement quand l’aurore s’éveilla dans la nature qu’une voix répondit enfin à sa désolation. Une voix à peine perceptible qui disait dans les profondeurs obscures de sa conscience :

— Es-tu sûre de n’avoir jamais eu tort ?

Malheureusement pour ces deux blessés dont les plaies morales ne cessaient de saigner depuis l’affreuse nuit, ils ne purent se permettre cette année les vacances en Bretagne ou en Provence comme les précédentes années. Denis croyait fermement que dans les paysages arides, violents, magnifiques de la vallée du Var il se serait apaisé et que l’amour souverain d’autrefois sourdrait pour lui de la terre ensoleillée, des senteurs violentes du thym et du genévrier. Geneviève aspirait