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de te faire sans bile, sans réclame, sans zèle inopportun, une jolie carrière dans l’administration. Je te vois très bien sous-préfet un beau jour à la Tour-du-Pin ou à Saint-Jean-de-Maurienne, si tu as ça d’ambition. Un très beau parti, vraiment, tu fais, Charleman. Dès maintenant tu jouis d’un ravissant appartement de garçon, à deux pas du boulevard des Invalides : un idéal comme maison nuptiale. Sans blague, tu es un mari inespéré pour cette petite dactylo…

— Ah ! ne dis pas cela ! C’est une princesse, c’est une fée. Ce n’est pas une petite dactylo. Elle ne voudra jamais m’épouser.

— Le lui as-tu demandé ?

— Non, pas encore.

— Idiot ! Crétin ! N’était-ce pas par là qu’il fallait débuter ? Comment ! voici une jeune fille arrachée à un milieu riche et sévère pour tomber tout à coup dans un essaim de compagnes plus ou moins folâtres, la plupart, au moins, assez flirt et ne reculant pas devant d’innocentes parties de plaisir du dimanche prises avec un camarade qui leur fait éperdûment la cour. Cette petite qui n’est qu’une gosse échappée à un milieu rigide et dont l’expérience est courte n’a pu voir en toi que cela : un garçon qui aimerait une camarade comme elle pour la conduire au cinéma le dimanche ou sur la Marne en canoë aux beaux jours de mai.

— Rousselière, tu as raison ! C’est inouï ce qu’on peut devenir imbécile quand on s’est toqué d’une femme ! Alors, première indication, selon toi, lorsqu’on s’aventure dans les voies d’un amour sérieux s’adresser aux parents ?

— Ou rassurer leur fille en demandant à leur être présenté.

— Tu es lumineux, Rousselière, et tu es chic !