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chaque jour, elle lui accordait un respect absolu de sa vie personnelle, de sa vie intérieure qui avait bien des chambres secrètes, elle s’en rendait compte, surtout depuis que ce congé de trois mois, accordé à la suite de la naissance de Jacques, la laissait à la maison…

C’étaient de petites choses qu’elle n’eût pas remarquées naguère encore, lorsqu’elle se rendait chaque jour au Pavillon du Contentieux, bercée par le rythme des affaires courantes, goûtant une espèce d’engourdissement laborieux à l’expédition des dossiers, — commerce agrémenté parfois de petits litiges avec le chef de Bureau. Le désœuvrement des semaines actuelles lui laissait bien de ces loisirs dans lesquels la pensée se joue comme au gré d’un labyrinthe.

Tout d’abord, au début de son congé, Geneviève n’avait pas mis en doute que son mari ne s’arrangeât pour revenir chaque jour ou du moins fréquemment déjeuner à la maison afin de profiter de sa présence, comme il s’était tant de fois vanté de pouvoir le faire si elle avait abandonné l’Administration. « Au besoin, répétait-il alors je sauterais dans un taxi et arriverais te surprendre. » Libre à lui d’en agir ainsi aujourd’hui. Elle ne bougeait plus de la maison. Elle avait pour un temps assumé ce fameux rôle de gardienne du foyer dont il lui avait tant rebattu les oreilles. Que ne réalisait-il son rêve ?

C’était l’occasion.

Il savait bien qu’il la trouverait toujours même en arrivant très tard. Faute d’y songer peut-être ? Ce n’était pourtant pas à elle de lui rappeler ses rêves d’autrefois. Et pendant de longs jours, le déjeuner servi, elle tardait à gagner la salle à manger pour donner encore à Denis le temps d’arriver peut-être. Après cinq ou six minutés quand