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les coudes aux genoux. Et elle l’entendit murmurer tout bas :

— Je ne suis pas si heureux que ça, Denise !

La première réaction de cette femme-enfant à ces mots, à cet aveu d’un jeune mari qu’elle imaginait nageant dans un bonheur absolu fut la stupeur. Elle restait clouée sur place.

— Comment ! Comment ! Ah ! que me dites-vous là, Rousselière !

Mais pour Denis, le plus difficile était lâché, Il avait joué le grand jeu, ouvert les vannes à sa rancune, renié Geneviève. Un peu gêné encore d’accuser sa femme devant une autre femme, il continuait avec des hésitations :

— Ah ! je reconnais toutes ses qualités, sa valeur, son grand cœur même. Mais ce que je lui reproche, voyez-vous, Denise, c’est d’être entrée dans le mariage avec des réticences. Pas généreusement ; pas totalement ; avec mille réserves. Je l’avais suppliée, quand j’ai compris combien je l’aimais, de lâcher cet affreux bureau, sa carrière. Je l’entends encore prononcer : « Que voulez-vous dire ? Renoncer à ma situation ? Sacrifier ma véritable destinée pour des besognes que n’importe quelle servante peut accomplir ? C’est à prendre ou à laisser. Je m’étais trompée sur vous. » Je l’ai boudée jusqu’à votre mariage, Denise. Ce jour-là nous nous sommes retrouvés face à face. C’est ce jour-là, sous les auspices de votre bonheur, sous l’influence des paroles magnifiques sur l’union de l’homme et de la femme prononcées par le prêtre à l’homélie, que le rapprochement s’est fait entre nous. Vous étiez devant nous, dans le chœur de l’église, une blanche apparition. C’était un signe que me faisait mon Destin. J’ai dit à Geneviève : « Je vous aime assez pour vous concéder tout ce que vous voudrez. » J’ai fait seul