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trouve accablée de tristesse. Tu n’es donc qu’une Bureaucrate et rien d’autre. Geneviève !

— Toi, Denis Rousselière, fils du félibre, tu es surtout un poète, voilà ce que je constate. Au moment où je vais toucher le but qui a été celui de ma vie administrative depuis dix ans, un obstacle surgit, capable de me barrer la route pour jamais, en tout cas, de la rendre plus difficile encore. Il y a bien de quoi m’accabler.

— Ma pauvre femme chérie, tu avoues donc qu’elle est difficile, ta vie, la double vie que tu mènes ?

— Oui, elle est difficile ; oui, elle est compliquée, mais elle ne me fait pas peur, et, bien que je devine tes arrière-pensées, ton secret espoir, car pareil à un joueur aux courses qui a misé sur la déroute d’un cheval qui bronche un peu, tu espères me voir lasse et abandonner la partie, je t’avertis que ce second bébé ne m’empêchera pas de continuer la route que je me suis tracée. J’y ai bien réfléchi depuis que je me sens menacée de cette nouvelle maternité. Et ne m’en veuille pas, chéri, si je repousse d’avance la prière que je sens en toi. Non, je t’en prie, ne la formule pas cette demande de demeurer à la maison désormais pour vivre chichement, au rétréci, en pouponnant des enfants et en faisant la cuisine. Non, non, car je ne le pourrai pas. Au contraire, l’avancement que je prévois, si mon état n’y met pas obstacle, arrangera tout. Cette bonne Mme Poulut est parfaite pour les enfants, mais aussi pour la cuisine. Alors elle resterait comme servante et nous prendrons une jeune nurse pour les enfants. Et, mon Dieu, cela ne sera pas si dramatique, tu verras.

Puis après une réflexion qui la rembrunit de nouveau :

— À condition que je sois nommée, toutefois…