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mais toujours en congé régulier et aucune décision ne pouvait être prise à son égard.

Dans cette expectative le chef lui-même faisait en quelque sorte l’intérim du petit bureau vitré où il appelait souvent Mme Rousselière pour lui confier quelque recherche ou correspondance délicate. Tout marchait assez bien ainsi et le statu quo pouvait se prolonger ce qui n’enchantait pas la jeune femme car cette organisation de fortune éloignait toujours l’avancement espéré. Il y avait bien de quoi assombrir une telle créature.

Mais cette tristesse à la longue inquiéta le mari. Souvent au lit, le matin, il s’apercevait que la jeune femme avait les paupières rougies et qu’elle s’efforçait à le cacher. D’abord, attribuant difficilement à une déception ambitieuse un tel signe de chagrin chez une tête aussi forte, il en vint à s’accuser. Est-ce qu’il ne se détachait pas un peu d’elle ? Est-ce qu’à force de la juger sans cesse en silence, il n’avait pas laissé transparaître un peu de la rigueur de ses verdicts ? À la pensée que cette fière compagne pouvait souffrir de se croire moins aimée, il s’interrogeait, examinait sa conscience, disséquait ses impressions. Mais non, découvrait-il au contraire, je l’aime toujours davantage. Bien plus qu’au début de notre mariage. D’abord il y a cette admirable société conjugale qui tisse ses chaînes toujours plus serrées entre l’homme et la femme. Il y a l’habitude, avec ses assises qui se font chaque jour plus profondes, l’habitude qui, à la longue, crée aux époux un besoin toujours inassouvi l’un de l’autre. Il y a cette tendre appartenance de la femme au mari pour laquelle, moi, Denis, je voue à Geneviève une gratitude éperdue. Aurais-je pu lui laisser entendre le contraire ?

Il allait chercher midi à quatorze heures, ima-