Page:Yver - Madame Sous-Chef.djvu/155

Cette page n’a pas encore été corrigée

une petite réunion boulevard des Invalides et invitèrent les Rousselière pour le prochain dimanche. Denis en manifesta un si grand plaisir que Geneviève ne put le laisser inaperçu :

— Comme tu aimes ces amis-là !

— Ah ! s’écria Denis, tu ne peux savoir ce qu’ils sont chics !

L’intimité de ce simple déjeuner fut charmante. De petits plats fins confectionnés par Denise ; un pâté aux aromes exquis après des hors-d’œuvre très décoratifs ; un vieux vin de Châteauneuf-du-Pape pour flatter la gourmandise de Rousselière ; enfin une fricassée de poulet qui constituait l’un des succès ordinaires de Denise. Rousselière se sentait heureux ; éprouvait comme la plénitude du bonheur. Et dans cette euphorie un rythme intérieur chantait dans le sang de ce fils du félibre, qui entendait à ses côtés le rire discret de Denise :

Oh ! Denise aux cheveux de lin
Oh ! Denise aux cheveux de fée !

Geneviève aussi renaissait. Par réaction contre l’accablement des mauvais jours, elle était aujourd’hui enjouée et rieuse, plaisantait sa propre déception de n’avoir pas été nommée sous-chef. Geneviève pouvait avoir beaucoup d’esprit quand les circonstances secouaient un peu sa disposition taciturne de Bretonne. Elle saisissait les petits travers de tous les bureaucrates qui l’environnaient au Ministère, les représentait finement sans méchanceté.

Puis elle raconta l’idylle de Ninette et du sergent de ville ; sa peine d’avoir perdu cette gentille servante ; l’histoire de Mme Poulut qui tenait à son titre de « gouvernante » et assommait le ménage de ses principes, mais prenait un soin méticuleux