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indiscernables de son âme pour apprécier le cycle et comme la gamme de ses perfections. Je cherche… je cherche… J’en suis encore à lui trouver un défaut !

Une ombre de tristesse passa sur le visage de Denis. Un sentiment sans beauté naissant dans le tréfonds de son être. Il faisait, malgré sa conscience mécontente, un parallèle entre Denise et Geneviève. Il se savait commettre une trahison subtile contre Geneviève, mais rien, aucune forme de scrupule, aucune voix divine au fond de lui-même ne pouvait l’empêcher de formuler cette pensée dans laquelle il y avait — il le savait — un petit sacrilège :

— Charleman est plus heureux que moi !

Ce ne furent que des instants bien brefs, l’espace d’un éclair. Mais devant l’image soudain apparue de sa femme loyale, de sa femme si pure qu’aucune idée de ce genre, il en était sûr, n’aurait su attaquer, il eut honte de lui-même et frémit intérieurement.

Et comme un homme qui se prendrait à bras-le-corps pour se remettre de force dans la voie droite

il prononça tout haut :

— Moi, vieux Charleman, je vais te dire, j’ai épousé une femme formidable. Elle n’a pas l’exquise bonté, le dévouement incessant, absolu de Denise. Je le sais bien. Je le sais bien. Je crois qu’elle pourra me faire souffrir quelquefois parce que sur quelques points elle est entière, rebelle même, absolue, sans les petites subtilités de Denise. Mais c’est une âme loyale, si grande dans son amour, si noble dans sa vie, si haute dans ses pensées que je l’adore ainsi.

Et il répéta deux fois ce : « Je l’adore » parce que c’était vrai, et qu’il ne fallait pas déconsidérer son amour, pire même, avoir l’air de le renier devant Charleman.