bien, et même beaucoup plus que vous ne le croyez. » La rudesse de l’une, la pudeur, la concision de l’autre avaient empêché qu’elles n’en disent plus long sur cette délicate et discrète amitié entre maîtresse et servante. Mais il y avait entre elles désormais une entente réciproque à laquelle ne portaient atteinte ni d’un côté les instinctives rancœurs de la servitude, ni de l’autre, l’instinctive exigence de celui qui commande.
Et puis, il y avait entre elles l’enfant. Geneviève savait gré à Ninette de ses soins si méticuleux pour le petit Pierre. Ninette était fière de la confiance qu’on lui montrait.
Il est tout de même beau, notre garçon ! s’était-elle écriée un jour en l’élevant au bout de ses bras grêles devant « Madame ».
Geneviève éprouvait beaucoup d’émotion à toutes ces gentillesses de la petite fille du peuple.
— Vraiment, disait-elle à son mari, c’est une créature de bonne volonté. Je vais pouvoir compter sur son cœur pour faire son devoir auprès de Bébé lorsque je ne serai plus à la maison. Je ne parle pas de son intelligence, car son intelligence, sans la sensibilité que je sens en elle ne serait rien. Néanmoins, c’est quelque chose qu’elle sache pourquoi, près de l’enfant, elle obéit à telle ou telle prescription.
— Femme chérie, disait Rousselière, tu sais bien que je t’admire en tout. J’ai connu des semaines bien douces pendant cette période que tu as passée chez nous. Maintenant, nous allons reprendre bras dessus, bras dessous nos courses quotidiennes. Ce sera bon encore, j’en suis sûr. Faisons confiance à la vie qui va recommencer bientôt.
Geneviève ne lui avoua pas que, jusqu’à ce moment-là, elle comptait les jours…