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contre comme à celle d’un petit souverain : un réflexe. Elle n’était pas encore habituée à la joie de posséder ce petit être. Elle se sentait comme grisée de sa toute jeune maternité. Mais elle voyait à son enfant un petit visage encore informe et souvent grimaçant dont elle avait un peu pitié, dont elle éprouvait le besoin de s’excuser. « Oh ! disait-elle, comme des dames se penchaient sur lui avec beaucoup de politesse, il n’est pas encore bien joli, mon pauvre petit, mais j’espère qu’il embellira. » Et les dames se récriaient.

Ce fut aussi une sorte d’apothéose pour la jeune Ninette qui revêtait ce jour-là un personnage nouveau, et d’importance, et pénétrait en même temps dans des sphères inconnues dont le cinéma seul lui avait donné jusqu’ici des aperçus féeriques. Au surplus, elle-même y jouait un rôle. Le taudis maternel était loin ! Cependant, naguère, autour d’un poêle au coke qui ronflait éperdument mais perdait ses cendres au milieu de la pièce, elle y avait pouponné ses petits frères dès huit ans, dès sept ans. Elle en avait gardé des gestes précis et adorables, avec ce petit coup de l’épaule pour soulever la tête du bébé que toutes les jeunes mères connaissent bien.

Vous avez une jeune nurse charmante ! disaient les dames à Geneviève.

— Oh ! c’est une simple petite bonne à tout faire, rectifiait-elle, dans son horreur du bluff, mais elle est fort gentille et fait bien tout ce à quoi elle s’applique.

Maintenant Ninette se gendarmait avec une grande dignité contre les quatre frères Braspartz très excités qui voulaient lui arracher des bras leur neveu. Et la fumée des cigarettes blondes se répandait dans le studio, formant un nuage mouvant qui, une fois dessiné, s’échappait vers la baie