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À la vérité, quand il tentait de parler, seuls ses proches, par l’habitude, parvenaient à le comprendre. Aujourd’hui, isolé sous les colonnes du Parthénon, il semblait appartenir à un autre monde. La bonne Blanche Arnaud le considérait à la dérobée ; les larmes lui montaient aux yeux, et une tristesse l’empêchait de se mêler à la conversation qui était fort animée. Le vieil Addeghem, toujours exubérant et plein de feu, en tenait le dé. Et on l’excitait à pérorer, tant sa juvénilité ranimait tous les esprits. Ce soir il s’attaquait à Nelly Darche, qui avait inauguré, depuis quelques Salons, une manière plus audacieuse encore et plus déconcertante que celle de ses premières toiles. Le critique lui reprochait sa négation des nuances et des plans, et ce genre qui faisait de ses tableaux l’image d’une palette aux tons éclatants, mais brouillés. Et Nelly Darche se défendait, expliquait son procédé, se prétendait inspirée de l’art persan, quand Brigitte introduisit cousine Jeanne.

Tout le monde se tut. Elle entrait, ayant aux lèvres son éternel sourire que l’épreuve n’avait point usé. Sa beauté, que la douleur travaillait et métamorphosait, produisait sur les plus indifférents une impression de mystère qu’ils n’analysaient pas. Elle s’imposait d’abord comme la compagne d’un grand artiste ; bientôt c’était son pouvoir personnel qu’on subissait.

Elle embrassa Jenny, Hélène ; Marcelle vint à