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Et c’était étrange, ces deux femmes, si étroitement liées par le devoir professionnel, qui mettaient en commun leur intelligence, pénétraient de concert l’existence intime de leurs clientes, fouillaient en collaboration les adultères, les trahisons, les mensonges de tant de cœurs, tandis qu’un mystère voilait pour l’une lame de l’autre.

« Devient-elle romanesque ! se demandait madame Martinal ; le vin de la célébrité l’a-t-il grisée comme certaines femmes, qui se trouvent ensuite à l’étroit dans le cadre exigu de la famille ?… Rêve-t-elle d’aventures ?… Le raisonnable Vélines ne suffît-il plus à son imagination ? aime-t-elle ailleurs ?… »

Madame Martinal éprouvait de la sympathie pour cet homme à l’esprit droit qu’était Vélines. Elle appréciait sa puissance intellectuelle, sa simplicité, sa correction. Vélines, de son côté, l’estimait. Il la constatait judicieuse, clairvoyante et bonne, et se plaisait à sa société. Le mari qui ne peut plus satisfaire près de sa compagne son besoin d’abandon moral ressemble au célibataire et au veuf ; tous trois se rapprochent, sans aucune sensualité, de la femme jeune ou vieille capable de les comprendre. Lorsque Henriette était retenue par une instruction, André ouvrait la porte du cabinet voisin, il apercevait la secrétaire :

— Ah ! vous êtes seule ici ?