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fourni l’occasion de plaider au civil. Louise, à la barre, restait craintive, balbutiante, montrait plus de bonne volonté que de talent. Un jour, elle y avait pleuré. Elle apprenait par cœur des livres de procédure, de jurisprudence. Servais faisait un stage rétribué chez un avoué : ni l’un ni l’autre n’arrivaient à gagner l’argent d’une mise en ménage ; pourtant ils espéraient se marier dans deux ans.

Soudain Henriette Marcadieu, qui malgré son petit air sage et pensif, avait les yeux partout, dit à voix basse à ses amies :

— Voilà monsieur Alembert ; je suis sûre qu’il vient relancer Fabrezan pour son procès.

À la foule des avocats et des hommes de loi se joignaient en effet de nombreux plaideurs. Des femmes, d’abord, à l’esprit de chicane tenace et incorrigible, de ces joueuses judiciaires, semblables aux passionnées de la roulette ou des courses, que cette folie ruine et détraque et dont tout le Palais connaît la mise excentrique, la présence obsédante. Il y avait là, en particulier, madame Gévigne, qui narrait au premier venu l’extraordinaire imbroglio de sa créance. Puis madame Leroy-Mathalin, qui occupait actuellement les tribunaux avec trois affaires pendantes, et enfin, à la porte de la première, un homme encore très jeune, d’une remarquable distinction, qui fourrageait sa barbe longue en cherchant quelqu’un du regard.