Page:Yver - Les Cervelines.djvu/250

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Qu’avez-vous répondu ? demanda Marceline sans trop savoir ce qu’elle disait.

— Rien, fit Cécile, je ne vous ai pas mesurée à elle.

Elle sentait avec un bonheur immense tout ce qu’il gardait en lui sans vouloir le dire. Après un silence, il reprit :

— Tisserel a été bien imprudent ; je l’avais averti ; on n’aime pas une Cerveline.

— Une Cerveline ? releva en souriant mademoiselle Rhonans, que le mot amusa ; vous appelez Jeanne une Cerveline ?

— Je pressens que le terme s’imposera bientôt pour signifier les femmes qui lui ressemblent, dit Cécile, d’une voix qui s’altérait. Vous le verrez ; on l’emploiera, parce qu’il y en aura trop, pour ne pas former comme une caste… Vous comprenez, une Cerveline ?…

Il la regardait alors anxieusement, désespérément.

Marceline ne répondit pas ; elle leva seulement ses deux mains à ses tempes, avec un mouvement qui était comme le signe d’un reflux de vie. Elle avait deviné. Elle avait aussi deviné, à n’en pas pouvoir douter davantage que s’il l’eût dite tout haut, la demande qui était dans ses yeux, dans l’ardente prière de tout son être. Elle se recueillit un instant, sachant qu’elle allait dire là quelque chose d’irrévocable, la concession suprême de ses altières théories, le mot dont la portée secrète allait l’engager à cet homme comme une promesse.

— Je ne suis pas une Cerveline.

Il comprit qu’elle l’aimait. Il allait être heureux,