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Et il pensait à Marc Dauxerre qui lui avait si fortement prédit ce guet-apens. Cependant que, dans une violente odeur de jacinthe, ils déjeunaient devant des baies ouvertes sur la mer et les îles de Lérins. La jeune fille aux bras nus parlait de la fête du mimosa, de la bataille de fleurs, des feux d’artifice du casino, ce qui n’ennuyait pas Hubert.

Quand elle fut partie :

— Il ne tiendrait qu’à vous, mon cher Hubert, songeait tout haut l’hôtesse. J’en ai une pour vous, une pour Bernard, une pour Ignace…

Mais là-dessus, Hubert éclata. Qui pensait-elle donc que fût le malheureux Ignace pour le traiter en civilisé ? N’était-ce pas déjà beaucoup de l’accepter dans ce décor fabuleux, de le réagréger à la famille à la faveur de cette rencontre préparée, au besoin de l’interroger sur ses moyens d’existence, de lui imposer une vie avouable, sans aller jusqu’à l’établir en honneur et en estime dans un milieu social dont ses dérèglements l’avaient déchu définitivement ? Et cette fois Hubert déchaîné, violent et sincère puisqu’il ne s’agissait plus de sa vie sentimentale, raconta tout ce qu’il savait d’Ignace, le frère lointain vomi par les siens. Son renvoi du collège des Pères à Rennes pendant la guerre ; son renvoi du collège Stanislas à Paris. Comment avait-il vécu, alors qu’on le