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et m’obligeaient d’obéir. À vrai dire, toutes ces expériences finissent par constituer un danger. On devient un homme de laboratoire. Quand arrive le moment d’industrialiser sa sensibilité dans une union durable, on en est aux petites doses, au microscope, à la balance de précision. Bref, je n’ai jamais pu aimer Odile, quoique, de bonne foi, j’aie désiré de m’attacher à elle. Elle n’est demeurée pour moi qu’une expérience mémorable. Odile m’a fait souffrir, d’accord. Mais, près d’elle l’homme de laboratoire n’a pas échoué. J’ai étudié à fond cette âme intraitable, entière, aussi vaine de ses robes démodées qu’une autre de ses costumes lamés et indécents. J’étais allé à elle invité par cette mollesse, cette blancheur, cette inconsistance. Je me suis heurté à une innocence coriace et à une vertu hautaine. Dès le lendemain des noces je l’ai senti, lorsque je suis allé la nipper rue de la Paix pour remplacer la garde-robe de sécuralisée préparée par ma belle-mère. Au lieu d’une petite fille gênée d’être mal mise, souffrant devant chaque glace, devant chaque femme élégante, j’ai découvert un être sans timidité, sans ignorance, qui ne démordait pas des étoffes de laine et ricanait devant les plus adorables mannequins. J’ai exigé du crêpe de Chine, des blouses molles, des manteaux brodés de motifs égyptiens,