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froidement la famine ou l’abondance, ordonnait les fusillades, imposait ses jugements aux tribunaux, infligeait la prison ou la mort, pouvait s’émouvoir quelquefois ?

Le duc se tourna vers Clara :

— Mademoiselle Hersberg, vous qu’elle aime tant, dites-lui qu’elle n’a pas ici d’ennemi, ce soir.

— Je sais bien que je n’ai pas d’ennemi, soupira Wanda, les mains jointes et comme accablée de lassitude, mais j’ai si peur de vivre !

Clara et le prince étranger échangèrent un regard ; ils avaient pitié tous deux de cette pauvre enfant sacrifiée ; ils se comprirent. Mais la compassion de Clara, dont le cœur était si tendre et si délicat, allait un peu aussi au personnage insondable à qui le bonheur ne s’offrait que comme un mirage. On ne pouvait demeurer insensible devant une jeune fille comme Wanda ; or il savait qu’elle serait un jour à lui et qu’elle eût préféré mourir.

— Chère Altesse, dit cette noble Hersberg avec l’ingéniosité des femmes qu’un sentiment vivifiant a pénétrées, monseigneur d’Oldany veut que je vous dise que vous avez ici un ami, le meilleur ami, le plus loyal, le plus fidèle, et qui mérite le mieux votre confiance…

— Vous avez ma confiance, Bertie, répliqua Wanda en souriant tristement au prince. Mais il faut me prendre avec mes faiblesses ; vous devez