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avait longtemps partagé le pain de sa pauvreté, et c’eût été cruel d’enlever la petite au moment où, il arrivait avec un ardent désir de la revoir.

Tous les jours, M. Patrice et sa petite protégée s’en allaient sur la grande place, où s’alignaient symétriquement les boutiques, pour épier l’arrivée du montreur de chiens. Tout le long du chemin, le cœur de l’enfant battait à grands coups… S’ils allaient être là, si elle allait les revoir !… Mais la pauvre petite avait, chaque jour, une nouvelle déception ; après avoir fait leur tour accoutumé, le vieillard et l’enfant se disaient tristement :

— Ce ne sera pas encore pour aujourd’hui.

Puis le froid revint et les grosses pluies, qui forcèrent les oiseaux de passage à s’en aller. Les planches furent déclouées ; à la grande animation succéda le tapage des marteaux, qui frappaient les poutres ; et il ne resta sur la grande place que des charpentes délabrées, d’où pendaient des lambeaux de toile grise. Enfin, tout cela fut encore abattu, et bientôt il ne demeura plus rien.

Le père Mousse n’était pas venu.

Jen pleura beaucoup quand elle vit qu’il n’y avait plus rien à espérer ; car, depuis longtemps elle appelait de tous ses vœux cette époque, qui devait, lui semblait-il, la combler de bonheur ; et quand, au bout de tous ses rêves, était venue se placer la cruelle réalité, elle en souffrit énormément.