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Hélios ! Hélios !
Le plus jeune des dieux et le plus admirable !
Déjà les flots
Reflètent en tremblant ton sourire innombrable…
Déjà la mer apaise ses sanglots…
La terreur m’abandonne.
Et la fièvre se calme en mes veines…


Mais le brusque rappel d’un souvenir le fait tressaillir. Étendant les bras vers l’astre dont les rayons brillent à travers les branches et font pâlir l’or des fruits enchantés, il s’adresse à lui dans un élan de ferveur douloureuse.


Et la fièvre se calme en mes veiPardonne !
J’ai douté ! J’ai faibli !
J’ai souhaité la paix ! J’ai souhaité l’oubli !
La nuit m’avait dompté, ta clarté me délivre !
— La nuit a duré si longtemps !…
Hélios ! Hélios ! Tu me vois ! Tu m’entends !
Je t’appelle, et mon âme est ivre !…
Je sais que tu souris, je sais que tu m’attends,
Et la nuit désormais peut me couvrir, m’étreindre,
Je ne dois plus la craindre
Ni lui céder, jamais !…