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 Quand il nous enferma dans ce jardin obscur,
Au milieu des rochers et des cimes d’azur
Plaça, pour nous garder, la trompeuse Immortelle
Qu’on cherche sans pouvoir jamais s’emparer d’elle,
Sans pouvoir la dompter, l’étreindre, la toucher,
Et que moi, — le Vainqueur, — je ne pus approcher.


ICARE.


 Et tu t’es résigné ! Tu travailles, tu rêves.
Dans ce palais bâti par toi…
Et tu regardes sans effroi,
À cette heure imprécise où les ombres s’élèvent
Au fond du jardin enchanté,
De vagues dieux danser et danser les Bacchantes…
L’obscurité,
Les sous-bois noirs où les acanthes
Et les vignes aux raisins d’or
Font trembler sur le sol des reflets d’améthyste,
Où chaque parole persiste
En un écho plus doux qui se prolonge encor,
Où la brise s’endort