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EARINA.


Et le morne univers par l’ombre épouvanté,
Malgré l’antique Nuit, oublie enfin sa crainte
Quand apparaît ton astre, ô blonde Aphrodité !


Les Nymphes se taisent. Au loin frémit toujours la mélodie indistincte des flûtes de Pan, qui, par moments, semble se rapprocher. La flamme légère met son reflet rose sur le visage de Kypris, immobile et souriante comme les trois sœurs inclinées. Seule, Rhodéia, qui n’a point encore parlé, se retourne avec une sorte d’inquiétude vers la partie la plus obscure du bois, attentive au bruissement des feuilles et au murmure léger du vent entre les branches.


RHODÉIA.


C’est lui !


(Icare apparaît dans la zone de l’ombre, et s’arrête, les yeux éblouis. Ses vêtements couverts de poussière sont presque en lambeaux. Il regarde fixement devant lui, en parlant avec une agitation fébrile.)


ICARE.


Je l’ai perdue ! Au fond de la clairière.
Je croyais voir frémir ses ailes de lumière,