Page:Yourcenar - Le Jardin des chimères.djvu/20

Cette page a été validée par deux contributeurs.


Tout se tait… La forêt s’alanguit et respire.
Dans l’air tremble l’écho d’une chanson d’oiseaux ;
Syrinx abandonnant son ténébreux empire
S’endort au milieu des roseaux.

C’est l’heure où le lézard allongé dans les herbes
Chauffe au soleil son corps chatoyant et frileux ;
Où le lièvre en passant fait onduler les gerbes ;
Où les mornes glaciers sont bleus.

C’est le matin… Joyeux, les papillons s’éveillent ;
Leur poids fait défaillir les calices ouverts.
L’ombre s’emplit d’un frais bourdonnement d’abeilles.
Pan rit au fond des halliers verts.

Mon souffle est l’âme de la Terre.
La forêt tressaille à ma voix.
Je suis la fraîcheur, le mystère,
L’haleine paisible des bois.

Mon chant est l’âme du silence,
Le frémissement des roseaux,
C’est lui qu’imitent les oiseaux
Sur la branche qui se balance…