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qu’au bout. Laura supporterait mieux ce temps d’épreuve si elle n’était pas occupée de lui ; elle comprendrait la cause de son absence, et il se fiait plus à son amour qu’il ne comptait sur sa fermeté pour entendre devant lui, sans se trahir, la liturgie du mariage. Il n’aurait pas aimé non plus à l’entendre le supplier encore de révéler leur promesse mutuelle à sa mère ; et, si par quelque malheur elle allait se découvrir, Charles saurait bien tourner cela contre lui, de manière à lui faire perdre pour jamais le reste de son influence à Hollywell. L’amour le pressait d’un côté, la prudence de l’autre. Jamais il n’avait été aussi indécis, et il en voulait à son oncle, à Charles, à Walter, de l’avoir placé dans cette désagréable alternative. Deux choses le consolaient pour le moment : la première, c’est qu’il avait envoyé son ami Thorndale chez son père, loin de lady Éveline ; la seconde, c’est que Maurice ne savait pas encore la grande nouvelle de Hollywell, et par conséquent ne lui en parlait pas.

Ce dernier sujet de satisfaction s’évanouit dès leur arrivée à Kilcoran ; car, lorsqu’ils entrèrent au salon, lady Éveline s’écria :

— Maurice ! il me tardait de vous voir ! Capitaine Morville, j’espère que vous ne lui avez rien dit et que je serai la première avec ma nouvelle ?

— Il ne m’a rien dit du tout, répondit Maurice. Jamais je n’ai eu un compagnon plus silencieux.

— Comment ! vous ne savez pas ? Je sais quelque chose que le capitaine Morville ignore ?