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Dans l’après-midi, Charles voulut qu’elle sortît pour se promener. Elle n’aurait pas demandé mieux que d’aller seule ; mais, à sa grande surprise, Philippe lui offrit de l’accompagner : elle fut trop heureuse de lui voir faire cet effort, pour regretter la promenade solitaire qu’elle avait espérée. Ils sortirent donc, après avoir ouvert la fenêtre pour donner aussi de l’air à Charles, qui voulait d’ailleurs aller à la découverte dans les appartements du rez-de-chaussée.

— Il nous faut trouver quelque moyen de le promener en voiture, ainsi que vous, dit Philippe en sortant ; car le pays est très montueux par ici.

Ils suivirent un sentier qui conduisait au haut de la pente gazonnée, où la brise de mer se faisait sentir.

Au bout de quelques minutes, Amable se trouva dans un lieu dont l’aspect la fit frissonner. Devant elle s’étendait la baie de Redclyffe, la baie de Walter ! Les vagues brisaient leurs crêtes écumantes, le vent mugissait, les oiseaux de mer se balançaient dans les airs, et au loin se dressait le Shag-Roc, sombre et sévère. C’était là cette scène qu’il aimait tant ! qu’il avait tant désiré de lui montrer ! et qui, à son lit de mort, lui avait causé un dernier regret ! C’étaient là ces vagues qu’il préférait aux blanches sommités des Alpes et, à présent, il dormait au milieu de ces montagnes éloignées, tandis qu’elle visitait, seule avec Philippe, les lieux qui lui étaient si chers !

Ce moment fut un de ceux où Amable crut particulièrement se sentir avec son époux. Le vent jouait avec son voile de crêpe ; elle tenait ses mains serrées