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Laura ne leva pas les yeux de toute la soirée, et Philippe au lieu d’aller hardiment se placer auprès d’elle, demeura assis la tête appuyée sur sa main, comme s’il eût été trop accablé par son indisposition pour penser à autre chose. C’était assez vrai ; les diverses émotions de cette journée avaient beaucoup augmenté son mal. Mais il était surtout gêné par la froideur que lui témoignait sa tante, et il craignait d’avoir l’air de vouloir la braver, en montrant à Laura tout ce qu’il sentait pour elle. La pauvre Laura, remarquant sa froideur, pensait qu’il souffrait beaucoup et qu’il ne l’aimait plus. Les manières de son père lui faisaient comprendre ce qui s’était passé dans la salle à manger ; elle honorait Philippe de ce qu’il se sacrifiait ainsi, en lui demeurant fidèle.

Madame Edmonstone, après avoir essayé différents remèdes pour soulager le mal de son neveu, vit que la seule chose à faire pour ces pauvres jeunes gens, était de les laisser s’expliquer ensemble. Elle envoya donc Charlotte au lit et monta chez Amy, et, sous quelque prétexte, Charles emmena son père.

Laura baissa la tête et fit un effort pour se remettre de son émotion, avant de s’expliquer avec Philippe. Mais lui, ôtant sa main de devant ses yeux, dès que la porte fut fermée, il se leva et regarda Laura. Elle aussi leva les yeux ; leurs regards se rencontrèrent et ils se comprirent. Il s’approcha d’elle et lui tendit la main, elle lui donna la sienne qu’il pressa, en imprimant un baiser sur son front.

Ils n’échangèrent pas un seul mot d’explication,