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— Cette propriété a toujours été entre les mains des héritiers mâles, dit Amable.

— Vous vous trompez. Le vieux M. Morville n’aurait jamais pensé à substituer des cousins éloignés à ses descendants directs. J’aurais grand tort de profiter de ces circonstances imprévues, et vous feriez tort à votre enfant si vous résistiez.

Il parlait avec tant de fermeté qu’il croyait avoir gagné sa cause. Mais Amable, qui n’était pas du tout convaincue, répondit :

— On a prévu ce cas dans notre contrat de mariage. Je crains qu’elle ne soit déjà beaucoup trop riche. D’ailleurs, Philippe, je suis sûre que telle serait la volonté de Walter.

Les larmes lui vinrent aux yeux.

— Quand cette enfant est née, je me suis dit : Elle sera pour moi, et Philippe sera chargé de Redclyffe. Je sais qu’il était heureux de penser que cette terre serait entre des mains aussi capables que les vôtres, et qu’il comptait sur vous pour achever tout ce qu’il avait commencé. Vous n’avez sans doute pas oublié les choses dont il vous a chargé ? Si vous renonciez à cet héritage, ce serait vous opposer à ses vœux ; non, vous ne le pourriez pas ! Songez quel malheur ce serait pour cette pauvre petite d’être l’héritière d’un si vaste domaine, et pour Redclyffe de tomber entre les mains d’un administrateur tel que moi !

Il poussa un gémissement.

— Si vous saviez quel fardeau !…