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— Je ne puis être fâchée contre vous !

— Vous me le permettez ?

— Oui, je vous permets de faire tout ce qui ne vous fait pas de mal.

— Et puis-je offrir à Philippe de lui écrire ! Personne d’autre ne le fera, et ce serait si triste pour lui de n’avoir pas de nouvelles !

— Faites ce que vous voudrez, ma chère enfant. Je le plains, sans doute, et je voudrais qu’il se consolât, si c’est possible. Mais, ne me demandez pas, Amy, de rien faire pour lui : il m’a trop cruellement trompée !

Madame Edmonstone quitta la chambre en pleurs. Amable s’approcha de la fenêtre ; elle regarda longtemps le châtaignier, puis le ciel. Ensuite elle s’assit et appuya son front sur sa main en méditant, et, au bout d’un moment, elle se leva, fortifiée, comme si elle avait conversé avec son mari.

Elle ne s’exagérait pas ce que Philippe souffrait. Il n’avait pas entendu parler de Laura ; il ne savait pas comment elle avait supporté la nouvelle de sa maladie, ni ce qui était résulté pour elle des suites de sa confession. Cependant il n’osait point faire de questions dans un pareil moment, car il y avait à peine un an qu’il avait causé à Walter les maux qu’il trouvait si difficiles de supporter. En se rappelant cela, il éprouvait par moment une sorte de satisfaction à être malheureux à son tour ; mais d’autres fois il se sentait tellement torturé, qu’il se croyait menacé de perdre la raison quand il serait laissé seul, avec cette incertitude.