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personne pour qui elles étaient presque aussi précieuses qu’à elle-même. Elle détournait la tête en parlant, pour ne pas voir les larmes de sa mère ; mais sa voix était parfaitement ferme. Les moments employés de la sorte furent la seule consolation de madame Edmonstone dans cette journée ; et quand elle entendait, dans le corridor, le bruit des pas de son mari, elle était sûre qu’il avait besoin d’elle pour écrire quelque lettre ou pour quelque arrangement. Philippe exigeait aussi des soins, quoique la présence de madame Edmonstone ne parût pas lui faire grand bien. Plus elle était attentive pour lui, plus il voyait qu’elle était blessée, et qu’elle faisait un effort pour lui pardonner. Les manières affectueuses, presque caressantes, qu’elle avait autrefois avec lui, et qu’il n’appréciait pas alors, avaient disparu pour faire place à celles d’une garde-malade soigneuse. Il n’osait pas lui dire un mot qui eût rapport à Laura, pas même parler d’Amable, dont il demandait plutôt des nouvelles à Arnaud.

Vers le soir, son extrême fatigue lui vint en aide. Il dormit toute la nuit, et se réveilla un peu reposé. Arnaud lui dit que lady Morville était assez bien, mais qu’elle n’avait pas dormi. Puis madame Edmonstone vint vers lui, et lui annonça que son oncle viendrait le voir dès qu’il serait levé, s’il se sentait en état de parler d’affaires. Philippe frémit, car, alors seulement, la pensée lui vint qu’il était l’héritier de Redclyffe. La mort qu’il avait causée lui profitait, et il se trouverait propriétaire de cette terre qu’il se rap-