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questionna, et parla de la manière la plus calme. Dès qu’il fut seul avec Amy, il lui dit avec un faible sourire :

— Il serait inutile, il serait faux de dire que je voudrais ne pas être soigné par vous. Le docteur croit qu’il y a peu à craindre de la contagion, et ce serait d’ailleurs trop tard pour prendre des précautions.

— J’en suis bien aise, dit Amy.

— Mais soyez prudente et ménagez-vous. Voulez vous me promettre de ne pas veiller ?

— Je vous remercie de ne pas me demander plus que cela, dit-elle avec une soumission mélancolique.

Il sourit encore.

— Que je suis fâché pour vous que vous nous ayez tous deux malades à la fois ! Mais c’est la volonté de Dieu !

La mélancolie de son regard, la douceur de son sourire, et la sérénité de son front, jointes à ses joues fiévreuses, à sa respiration oppressée et à son air d’extrême lassitude, lui donnaient une beauté étrange et triste ; Amy, tout en éprouvant un ardent amour pour cet époux, dont tout son bonheur dépendait, le regardait aussi avec une espèce de crainte religieuse, comme s’il eût été trop au-dessus des autres mortels par ses pensées et ses sentiments. Elle se pencha sur lui et baigna son front avec de l’eau de Cologne ; puis, comme ses cheveux le gênaient en tombant sur sa figure, il la pria de couper la boucle de devant. Il y avait quelque chose de triste dans cette opération, car cette vague dorée, comme l’appelait Char-