Page:Yonge - L'héritier de Redclyffe, Vol 1, 1855.djvu/114

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 108 —

elle avait une confiance, aveugle en sa fille, et Charles ne voulait pas entendre parler raison. Puis Philippe venait d’apprendre que son régiment allait être passé en revue, en sorte qu’il aurait peu de loisir pour observer ce qu’on ferait à Hollywell ; enfin le colonel Deane se proposait de donner un bal, qui serait la répétition de celui de lord Kilcoran.

Abîmé dans ses pensées, Philippe suivait la route poudreuse. La chaleur était étouffante, et tout dans la nature semblait en ressentir l’influence. Les insectes n’avaient plus la force de voler, les fleurs baissaient la tête, pas un souffle de vent n’agitait le feuillage. Dans le parc il n’y avait que quelques vaches endormies à l’ombre des arbres, et un petit cheval qui semblait n’avoir pas le courage de bouger.

Trim était aussi couché sur les marches du péristyle, la langue pendante et le souffle haletant. Il se leva pourtant en branlant la queue à l’approche de Philippe.

Comme celui-ci entrait dans l’antichambre, il entendit chanter au salon.

C’étaient Walter et Laura, et Philippe les trouva auprès du piano, dans la vaste pièce dont les persiennes baissées avaient complètement exclu la chaleur. Les deux jeunes musiciens avaient un air heureux et paisible qui formait un contraste aussi frappant avec l’agitation de Philippe, que la fraîche atmosphère du salon différait de la route poudreuse et brûlante. Le capitaine, se sentant disposé à la jalousie, fut plus poli que jamais ; mais Laura lui trou-