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resse, non le pourquoi ; et, lorsque ce pourquoi n’est pas évident, il ne se soucie guère de le démêler. Si émouvant que soit son récit du procès des Arginuses, on ne distingue pas bien les causes profondes de ce mouvement populaire ; le singulier revirement de Thèbes, au lendemain de la défaite : d'Athènes, n’est pas expliqué ; l’interdépendance des événements qui se passent en Grèce, en Asie Mineure, dans l'empire du Roi, n’est plus sentie à partir du moment où Agésilas revient en Europe ; on ne discerne à aucun moment comment, dans les grandes cités qui menaient le jeu, Sparte, Thèbes, Athènes, la politique intérieure et la politique extérieure réagissent l’une sur l’autre. Sans doute voit-on, dans la seconde partie tout au moins, Xénophon juger choses et gens ; mais ce sont jugements de détail, où l'on retrouve son expérience des choses militaires, mais aussi ce bon sens un peu court, cette piété bornée qui rappellent à la fois l’Anabase et les Mémorables. — Aussi, dans ce récit si attrayant, par endroits si vivant, il manque une vue d’ensemble, et, en en achevant la lecture, on peut se demander quel pouvait être, pour Xénophon, le sens des événements qui se sont déroulés entre 404 et 362. Comme il s’est abstenu de tout préambule, on doit, pour résoudre cette question, interroger son œuvre qui ne donne pas une réponse très claire. De l'avis de Denys d’Halicarnasse[1], les Helléniques ont essentiellement pour sujet la renaissance d'Athènes, depuis la chute d'Athènes jusqu’au relèvement des Longs-Murs — jugement surprenant quand on songe que Xénophon n'a pas même songé à mentionner l’existence de la seconde confédération athénienne[2]. Dira-t-on qu'il a voulu essentiellement écrire l’histoire de la grandeur et de la décadence de Sparte ? Évidemment le contraste est grand entre les années qui précèdent 382 et celles qui suivent cette date, mais ce contraste existe dans les faits plus qu’on ne le retrouve dans


    après 380. — M. de Sanctis reconnaît d'ailleurs (l. laud., p. 188) la valeur du récit de l’Anonyme pour la campagne de Phrygie (XVIII, 33-XX, 30), résumée dans les Helléniques par une ligne insignifiante IV, 1, 1).

  1. Den. Hal., Epist. ad Cn. Pomp., IV : cf. Rev. Phil., 1930, p. 115.
  2. Rev. Phil., 1930, p. 214.