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de l’argent on fait bien des choses à Athènes, et l’on en ferait encore plus si les donneurs d’argent étaient plus nombreux, mais ce que je sais, c’est que la ville ne pourrait jamais suffire a tout ce qu’on requiert, quand on y apporterait tout l’or et tout l’argent du monde. Procès au sujet d’un tel qui n’a pas radoubé un vaisseau, ou qui a construit un édifice public ; procès contre les choréges, à propos des Dionysiaques, des Thargélies, des Panathénées, des Prométhies, des Héphesties[1], et cela tous les ans : nomination annuelle de trois cents triéraques, sur la demande desquels il y a, tous les ans, action judiciaire ; vérification des pouvoirs ; jugements sur enquête afférente à la condition des orphelins ; établissements de gardes pour les prisons : voilà pour l’année courante. Maintenant, de temps à autre, jugements pour délits militaires, pour toutes sortes de crimes imprévus, pour un acte inouï de violence ou d’iniquité. J’en passe, et beaucoup ; et cependant j’ai dit l’essentiel, sauf l’assiette de l’impôt, qui a lieu d’ordinaire tous les cinq ans. Eh bien ! ne croyez-vous pas qu’il faille connaître de toutes ces affaires ? Qu’on vienne dire, en effet, qu’il n’est pas nécessaire d’en connaître sur-le-champ ; c’est vrai, il n’est pas nécessaire qu’elles soient toutes expédiées sur-le-champ, mais il est urgent qu’elles le soient dans l’année. Or, dans l’état actuel, l’année ne peut suffire aux juges pour la répression des griefs d’une population aussi nombreuse. Eh bien ! dira-t-on encore, que l’on juge tout, mais que les juges soient moins nombreux. Oui ; mais il faut, si l’on établit un grand nombre de tribunaux, qu’il n’y ait, dans chaque tribunal, qu’un petit nombre de juges ; et alors il sera plus facile d’intriguer auprès de quelques juges, et la corruption fera rendre beaucoup moins de sentences équitables.

En outre, il faut songer que les Athéniens ont des fêtes durant lesquelles il n’est pas permis de juger ; et ils ont des fêtes deux fois plus qu’ailleurs[2] ; mais je veux bien supposer qu’ils n’en ont pas plus que la ville qui en a le moins. Cela étant, je dis qu’il est impossible que les affaires aillent à Athènes autrement qu’elles ne vont, à moins qu’on ne puisse peu à peu retrancher d’un côté, pour ajouter de l’autre. Or, on ne peut exécuter de grands changements sans enlever quelque chose à la démocratie. En effet, s’il ne s’agit que d’améliorer le gouverne-

  1. Fêtes de Bacchus, d’Apollon et de Diane, de Minerve, de Prométhée et de Vulcain. Voyez cet différents mots dans le Dictionnaire de Jacobi.
  2. Cf. Montesquieu, Esprit des lois, liv. XXIV, chap. XXIII.