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tandis que sur mer, si l’on est supérieur en forces, on débarque, ou bien, dans le cas contraire, on côtoie le rivage, jusqu’à ce qu’on soit arrivé chez un peuple ami ou plus faible.

Les maladies des fruits, envoyées par Jupiter, sont désastreuses pour ceux qui dominent sur terre ; mais sur mer elles n’ont rien de grave. Tous les pays ne sont pas maltraités en même temps ; en sorte que des contrées productives arrive tout ce qu’il faut aux maîtres de la mer. D’ailleurs, s’il faut mentionner des détails moins importants, leur puissance maritime a fait trouver aux Athéniens, par le commerce, de quoi fournir au luxe de leur table. Tout ce qu’il y a de délicieux en Sicile, en Italie, à Cypre, en Égypte, en Lydie, dans le Pont, dans le Péloponèse et ailleurs, tout cela s’est concentré sur un seul point, grâce à l’empire de la mer, De plus, entendant toutes les langues, ils ont choisi telle expression de celle-ci, telle autre de celle-là ; et, tandis que les Grecs conservent leur idiome, leurs mœurs et leur costume national, les Athéniens offrent un mélange de tous les Grecs et les Barbares[1].

Passons aux sacrifices, aux offrandes sacrées, aux fêtes et aux temples. Ce peuple, comprenant qu’il était impossible à chaque citoyen pauvre de sacrifier, de faire des banquets, d’avoir des temples, d’habiter enfin une ville belle et grande, s’est avisé d’un expédient pour participer à ces avantages. La ville immole de nombreuses victimes aux frais de l’État, et c’est le peuple qui fait les banquets et se partage au sort les victimes. Il en est de même des gymnases, des bains, des vestiaires ; quelques riches en ont à eux, mais le peuple se fait bâtir pour lui-même force palestres, vestiaires et lavoirs ; et la plèbe même jouit d’une plus grande quantité de ces établissements que le petit nombre des heureux.

Les Athéniens sont encore le mieux à portée de s’enrichir parmi les Grecs et les Barbares. En effet, que telle ville soit riche en bois de construction, où les vendra-t-elle, si elle ne commence pas par se mettre bien avec le roi de la mer ? Que telle autre soit riche en fer, en airain, en lin, où trouvera-t-elle un débouché, si elle est mal avec le souverain des eaux ? De là me viennent des vaisseaux qui me fournissent, de chez l’un du bois, de chez l’autre du fer, d’ici de l’airain, de là du

  1. Cette remarque est précieuse pour la philologie. Voy. Matthiæ, Gram. gr., 1re partie, introduction, p. 8 et 9. — Cf Ficker, Litt. ancienne, trad. Theil, t. I, p. 55.