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les honora d’une double portion, non pour les autoriser à manger le double des autres, mais par honneur, et afin de leur donner de quoi recevoir qui bon leur semblera.

Il a encore permis à chacun des deux rois d’admettre deux convives à leur table ; on leur donne le nom de Pythiens. Il leur a de même accordé de prélever un porc sur chaque portée de truie, afin que le roi ne manquât jamais de victimes, s’il avait à consulter les dieux. Près de la demeure royale est un étang qui fournit de l’eau en abondance : ressource dont l’utilité peut être surtout appréciée de ceux qui en sont privés. Tout le monde se lève de son siège en présence du roi, excepté les éphores de leurs sièges éphoriques. Tous les mois on se prête un serment réciproque, les éphores au nom de la cité, le roi en son propre nom. Le roi jure de régner conformément aux lois établies ; la cité jure, tant que le roi sera fidèle à sa promesse, de conserver intacte la royauté

Tels sont les honneurs que la patrie accorde au roi vivant, honneurs qui ne le mettent pas fort au-dessus des particuliers ; c’est que le législateur n’a pas voulu inspirer au roi des velléités de tyrannie, ni aux citoyens la haine du pouvoir. Mort, le roi reçoit des honneurs qui prouvent que, d’après les lois de Lycurgue, les Lacédémoniens considèrent moins leurs rois comme des hommes que comme des demi-dieux[1].



CHAPITRE XIV (XIII).


Autorité et fonctions du roi à la guerre.


Je vais exposer maintenant la puissance et l’autorité que Lycurgue accorde au roi dans l’armée. D’abord l’État nourrit à la guerre le roi et sa maison. Les polémarques, toutefois, logent dans la même tente que lui : on veut qu’étant toujours avec le roi, ils puissent, au besoin, l’aider de leurs conseils. Dans la

  1. On pleurait le roi mort par toute la Laconie, et il y avait une loi qui ordonnait que dans chaque maison deux personnes libres, un homme et une femme, prissent des habits de deuil. Un nombre déterminé, plusieurs mille au moins, de périèques et d’hilotes, étaient convoqués à Sparte, pour chanter les exploits du roi défunt et l’exalter au-dessus de tous ses devanciers. — Cf. pour les derniers mots du chapitre. Hist. gr. III, ch. III, t I, p. 411 de notre traduction.