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    tu te laissas entraîner ainsi à la gloire des conquêtes. Dans le cours rapide de tes victoires et de ta jeunesse, t’es-tu demandé une seule fois à quoi te serviraient, à toi et à la postérité, tant de nations, d’immenses contrées soumises à ta puissance ? Ton génie pouvait-il être présent partout, vivre et agir dans la suite des générations ? Partant, quel fardeau as-tu imposé à tes souverains, en les couvrant du manteau royal, que tant de richesses et d’ornements surchargeaient d’un poids accablant ? Il ne pouvait manquer de se déchirer en lambeaux, ou d’entraîner dans sa chute celui qui en était revêtu. Telle fut l’histoire de la Perse sous les successeurs de Cyrus. L’exemple de son génie aventureux avait tellement élevé leur audace, qu’ils cherchèrent à agrandir un empire qui ne pouvait que décroître. Ainsi, partout pillant et ravageant, l’ambition d’un ennemi qu’ils avaient provoqué ne tarda pas à les conduire à une fin déplorable. L’empire persan eut à peine deux siècles d’existence, et il est étonnant qu’il ait duré si longtemps ; car ses racines étaient si peu profondes, et ses branches si étendues, que chaque jour sa chute devenait plus inévitable. » Herder, Idées sur une histoire de l’humanité, t. II, liv. XII, II, p. 361 de la traduction d’Edgar Quinet.