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core, les ressorts qu’il faisait jouer pour obtenir le premier rang auprès de ceux dont il désirait l’amitié.

Quant aux jeux qu’il proposait, aux prix qu’il assignait pour entretenir une noble émulation, s’ils méritaient des éloges à Cyrus, parce qu’il fournissait par là des encouragements à la vertu, ils excitaient aussi des rivalités et des contestations entre les grands. De plus, il avait fait une sorte de loi à tous ceux qui auraient ou un procès à juger, ou quelques différends à l’occasion des jeux, de prendre de concert des juges pour les terminer. On comprend aisément que les deux parties ne manquaient pas de choisir pour juges ceux des grands auxquels elles étaient le plus attachées, et il résultait de ces jugements que le vaincu, jaloux de son adversaire, devenait ennemi des juges qui ne lui avaient pas été favorables, et que le vainqueur, attribuant son succès à la bonté de sa cause, s’imaginait n’avoir d’obligation à personne. Il régnait parmi ceux qui prétendaient au premier rang dans l’amitié de Cyrus, comme cela se voit dans les républiques, cette jalousie réciproque qui fait que l’on ne cherche qu’a se supplanter les uns les autres, loin de chercher à se rendre de bons offices.

Voilà ce que nous avions à dire sur les expédients employés par Cyrus pour se faire aimer des grands plus qu’ils ne s’aimaient entre eux[1].


CHAPITRE III.


Pompe de Cyrus sortant de son palais pour aller offrir un sacrifice. — Jeux équestres. — Conversation de Phéraulas avec un Sace sur le prix des richesses.


Nous allons raconter maintenant comment Cyrus sortit pour la première fois de son palais. La pompe même de sa marche peut être considérée comme un nouveau moyen inventé pour rendre son autorité plus respectable. Et d’abord la veille de la cérémonie, il fait venir les chefs des Perses et des alliés et leur distribue des robes médiques. En faisant cette distribution,

  1. Remarquons avec M. Adolphe Garnier ce qu’il y a de curieux à voir ainsi un républicain d’Athènes organiser le palais et l’administration d’un monarque persan. Mémoire sur Xénophon, p. 54.