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grand des biens pour acquérir des richesses, sachez qu’elle est encore le plus grand des biens pour conserver ce que l’on a acquis. Autrefois plusieurs d’entre nous ne donnaient d’ordre à personne, ils en recevaient ; aujourd’hui, vous tous qui êtes ici présents, vous vous trouvez dans une situation telle, que vous commandez les uns à un plus grand nombre d’hommes, les autres à un plus petit. Vous voulez tous qu’ils vous soient soumis : de la même manière nous devons tous obéir à ceux qui ont autorité sur nous. Il y a toutefois cette différence entre nous et des esclaves, que les esclaves ne suivent leurs maîtres que par force, tandis que nous, si nous voulons agir en hommes libres, nous devons faire de bon gré ce que nous croyons le plus digne de louange. Vous verrez qu’une ville qui n’est pas soumise au gouvernement d’un seul, quand elle veut bien obéir aux magistrats, n’est point exposée à subir la loi des ennemis. Soyons donc, comme Cyrus nous le recommande, près de la demeure royale ; exerçons-nous à tout ce qui peut nous garantir ce que nous possédons, et montrons-nous prêts à exécuter au besoin tout ce qu’il plaira à Cyrus de nous ordonner ; car il faut bien comprendre que Cyrus ne peut rien faire pour son bien qui ne soit pour le nôtre, puisque nos intérêts sont les mêmes et que nous avons les mêmes ennemis. »

Ainsi parle Chrysantas : plusieurs des assistants, Perses et alliés, se lèvent et appuient ses paroles. Il est décidé que les nobles se rendront tous les jours à la porte, pour y recevoir les ordres de Cyrus, et y demeureront jusqu’à ce qu’il les congédie. Ce qui fut alors établi est pratiqué encore en Asie par ceux qui obéissent au roi : ils se rendent à la porte du palais pour faire leur cour. On a vu jusqu’ici que le but de toutes les institutions de Cyrus était d’affermir sa puissance et celle des Terses : aussi ont-elles été maintenues constamment par les rois qui sont venus après lui. Elles ont éprouvé, d’ailleurs, le sort de toutes les choses humaines : quand il y a un bon prince, les lois sont observées avec exactitude ; quand le prince est mauvais, on les observe mollement. Ainsi les nobles se rendaient tous les jours, à la porte de Cyrus, avec leurs chevaux et leurs armes, suivant le règlement adopté par les braves guerriers qui avaient contribué à renverser l’empire des Assyriens.

Cyrus prépose alors différents officiers à divers détails d’administration, percepteurs des tributs, payeurs des dépenses, inspecteurs des ouvrages publics, gardes du trésor, surveillants des approvisionnements publics ; il prépose au soin des che-