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ainsi, je suis sûr qu’on le recevra et qu’on le priera même de rester jusqu’à ce que tu te sois éloigné. — Crois-tu, dit Cyrus, qu’une fois entré, il puisse nous remettre la place entre les mains ? — C’est très-probable, dit Gobryas, s’il a disposé tout au dedans, tandis que tu attaqueras vigoureusement par dehors. — Va donc, dit-il, donne-lui les instructions nécessaires et négocie son alliance avec nous ; pour notre sincérité, tu ne saurais lui dire ni lui montrer rien qui l’atteste mieux que ce que toi-même as reçu de nous. »

Sur ce point, Gobryas se met en route : ravi de le voir, l’eunuque convient de tout avec lui, et l’accord est fait. Quand Gobryas lui a fait connaître que tout est parfaitement arrangé avec l’eunuque, Cyrus, le lendemain même, commence l’attaque ; Gadatas résiste ; mais Cyrus emporte la place indiquée par Gadatas lui-même. Quant aux envoyés que Cyrus a dépêchés en leur indiquant la route à suivre, Gadatas en laisse échapper quelques-uns, afin qu’ils ramènent des troupes et apportent des échelles, et en arrête d’autres qu’il interroge en présence de témoins. Dès qu’il a su d’eux le but de leur mission, il fait ses préparatifs de départ, et, sous prétexte d’aller en faire le rapport, il se met en route dès la nuit même. Décidément convaincu qu’il vient en auxiliaire, on l’admet dans la place forte. Là, il se concerte avec le gouverneur pour se mettre sur la défensive ; puis, quand Cyrus arrive, il se rend maître de la place, avec l’aide des prisonniers envoyés par Cyrus.

Quand tout est bien réglé pour assurer sa prise, Gadatas sort au-devant de Cyrus, en se prosternant devant lui selon l’usage : « Réjouis-toi, Cyrus, lui dit-il. — C’est ce que je fais, puisque, d’accord avec les dieux, non-seulement tu m’y invites, mais vous m’en faites un devoir. Sois sûr que ce m’est d’un grand prix de laisser cette place à des alliés. Pour toi, Gadatas, si, comme il paraît, l’Assyrien t’a privé de la faculté d’avoir des enfants, il ne t’a point privé des moyens d’avoir de amis : sois donc persuadé que tu t’es créé en nous par ton action des amis qui, si nous le pouvons, s’efforceront de te venir aussi bien en aide que si tu avais des fils et des petits-fils. » Voilà ce qu’il lui dit. Au même moment l’Hyrcanien, informé de ce qui s’est passé, accourt, et lui prenant la main droite : « Ô précieux trésor peur tes amis. Cyrus, que je sais donc grâce aux dieux qui m’ont conduit vers toi ! — Va, reprend Cyrus, prendre possession de cette place qui me vaut de toi