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« Qu’est-ce donc, Cyrus ? Que fais-tu donc de te montrer ainsi aux Indiens ? Je voulais que tu parusses en brillant costume. C’est un honneur pour moi, qu’étant le fils de ma sœur, tu te présentes splendidement vêtu. » Cyrus lui répond : « Et t’aurais-je fait plus d’honneur, Cyaxare, si j’avais une robe de pourpre, des bracelets aux poignets, un collier au cou, et si j’avais mis un long temps à t’obéir, qu’en t’obéissant, comme aujourd’hui, avec une rapidité qui t’honore, en me faisant honneur, ainsi qu’à toi, par la sueur et par le zèle, et en montrant une armée si docile à tes ordres ? » Voilà ce que dit Cyrus. Cyaxare, jugeant qu’il a bien parlé, fait introduire les Indiens.

Les Indiens introduits disent que le roi des Indiens les envoie s’enquérir pourquoi il y a guerre entre les Mèdes et l’Assyrien. « Quand nous t’aurons entendu, il nous a ordonné d’aller ensuite trouver l’Assyrien, et de lui faire aussi la même question, et à la fin, de vous dire à tous deux que lui, roi des Indiens, après avoir considéré le bon droit, se mettra du côté de l’offensé. » À cela Cyaxare répond : « Écoutez-moi donc vous dire que nous n’avons en rien offensé l’Assyrien. C’est à lui, si vous le voulez, qu’il faut aller à présent pour savoir ce qu’il dit. » Cyrus présent demande à Cyaxare : « Et moi, dit-il, puis-je dire mon avis ? À Cyaxare l’y ayant engagé : « Vous direz donc au roi des Indiens, ajoute Cyrus, à moins que Cyaxare ne soit d’un avis contraire, que nous sommes décidés, si l’Assyrien se dit offensé par nous, à choisir le roi des Indiens pour juge. » Cette réponse entendue, les envoyés se retirent.

Quand les Indiens sont sortis, Cyrus entre en discours avec Cyaxare et lui dit : « Cyaxare, je suis venu ici, sans avoir apporté beaucoup d’argent de chez moi. Cependant, si peu que j’en avais, il m’en reste maintenant à peine. J’ai tout dépensé pour les soldats. Peut-être es-tu surpris que j’aie fait cette dépense, toi les ayant nourris. Mais sache bien que je n’ai pas fait autre chose que de récompenser et de gratifier tous les soldats dont j’étais satisfait. Car il me semble que quiconque veut avoir de bons auxiliaires, en quoi qu’il veuille faire, doit plutôt provoquer l’obéissance par de bonnes paroles et de bons offices que par la rigueur et la contrainte. Mais c’est surtout pour la guerre qu’il faut, selon moi, quand on veut avoir des auxiliaires dévoués, essayer de les prendre par de bonnes paroles et de bons offices. C’est l’amitié et non la haine qu’il faut faire naître dans le cœur de ceux qui doivent être des alliés éprouvés, incapables de jalousie envers le chef dans les succès, et de trahison dans les