non, l’autre à Cléarque : Cléarque, jugeant que le soldat de Ménon avait tort, le frappe ; le soldat, de retour à son camp, raconte la chose : à son récit, les soldats se fâchent et deviennent furieux contre Cléarque. Le même jour, Cléarque, étant allé au passage du fleuve pour y surveiller le marché, revenait à cheval vers sa tente, en traversant le camp de Ménon. Il n’avait avec lui que quelques hommes. Cyrus n’était pas encore arrivé, mais il était en route. Un des soldats de Ménon, qui fendait du bois, voyant Cléarque passer, lui jette sa hache, et le manque ; un autre lui lance une pierre ; un troisième en fait autant ; puis un grand nombre attirés par les cris. Cléarque se sauve dans son quartier, crie sur-le-champ aux armes, ordonne aux hoplites de rester en bataille, les boucliers placés devant leurs genoux ; pour lui, suivi des Thraces et des cavaliers qui étaient dans son camp, au nombre de plus de quarante, Thraces aussi pour la plupart, il marche droit à la troupe de Ménon, qui, frappée d’étonnement, ainsi que Ménon lui-même, court aux armes ; quelques-uns restent en place, ne sachant que résoudre. Alors Proxène, qui finit par arriver à la tête d’une compagnie d’hoplites, fait avancer ses hommes entre les deux partis, commande de mettre bas les armes, et supplie Cléarque de pas agir comme il allait le faire. Cléarque, qui avait failli être lapidé, est furieux d’entendre Proxène parler si tranquillement de son affront. Il le presse de lui laisser le champ libre. Cependant Cyrus arrive, apprend la nouvelle, saisit ses armes, arrive entre les deux troupes, suivi de quelques-uns de ses fidèles, et s’écrie : « Cléarque, Proxène, et vous Grecs ici présents, vous ne savez pas ce que vous faites, si vous vous battez entre vous ; songez-y, dès ce jour ma perte est décidée, et la vôtre suivra de près la mienne. Mes affaires tournant mal, tous les Barbares que vous voyez ici seront pour moi des ennemis plus dangereux que ceux qui sont auprès du roi. » En entendant ces mots, Cléarque revient à lui, les deux partis s’apaisent, et l’on met bas les armes.
Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/25
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.