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vin, vingt bœufs et cent brebis. La plaine est traversée par un fleuve nommé Lycus, large d’environ deux plèthres.

Les soldats, s’étant assemblés, délibèrent s’il vaut mieux sortir de l’Euxin par terre ou par mer. Lycon d’Achaïe se lève et dit : « Je suis étonné, soldats, que nos stratèges n’essayent pas de nous procurer des vivres. Les présents hospitaliers assurent à l’armée des vivres pour trois jours ; mais où nous fournirons-nous de vivres pour le reste de la route ? je n’en sais rien. Je suis donc d’avis de demander à la ville d’Héraclée au moins trois mille cyzicènes. » Un autre dit qu’il faut exiger une solde de dix mille cyzicènes au moins. « Choisissons des députés tout de suite, sans désemparer ; envoyons-les à la ville, et sachons leur réponse pour en délibérer. » On propose pour députés d’abord Chirisophe, en sa qualité de général en chef. Quelques-uns nomment aussi Xénophon. Ils refusent tous deux avec force. Ils pensaient qu’on ne devait exiger d’une ville grecque et amie que ce que les citoyens voudraient eux-mêmes donner. Comme ils avaient de l’éloignement pour une telle mission, on envoie Lycon d’Achaïe, Callimaque de Parrhasie et Agasias de Stymphale. Arrivés à Héraclée, ceux-ci disent ce qui a été décidé : on dit que Lycon ajouta des menaces, si l’on n’obéissait pas sans réserve. Après l’avoir entendu, les Héracléotes répondent qu’ils vont délibérer. Ils font rentrer aussitôt tout ce qu’ils ont de biens dans les champs, approvisionnent leur ville, en ferment les portes et paraissent en armes sur les remparts.

Les auteurs de ce désarroi accusent les stratèges d’avoir fait manquer l’affaire. Les Arcadiens et les Achéens se réunissent à part. À leur tête sont Callimaque de Parrhasie et Lycon d’Achaïe. Ils disent qu’il est honteux qu’un Athénien qui n’a pas amené de troupes à l’armée commande à des Péloponésiens et à des Lacédémoniens ; qu’ils ont toute la peine et d’autres le profit, et cela quand ce sont eux qui ont sauvé l’armée ; que les Arcadiens et les Achéens ont tout fait : que le reste n’est rien ; et, de fait, les Arcadiens et les Achéens composaient la moitié de l’armée ; que, s’ils avaient un peu de bon sens, ils se réuniraient, se choisiraient eux-mêmes des stratèges, feraient route à part, et tâcheraient de faire quelque bonne prise. L’avis est adopté. Tout ce qu’il y a d’Arcadiens et d’Achéens abandonnent Chirisophe et Xénophon et font corps à part. Ils en élisent dix d’entre eux pour stratèges, et arrêtent que ceux-ci feront exécuter tout ce qui sera décidé à la pluralité, des voix. Ainsi tombe