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Stymphale, un des lochages, voyant tout près de se précipiter un barbare richement vêtu, le saisit pour le retenir. Celui-ci l’entraîne, et tous deux, roulant de rochers en rochers, tombent et meurent. On ne fit que peu de prisonniers, mais on trouva beaucoup de bœufs, d’ânes et de moutons.

De là on fait, en sept étapes, cinquante parasanges, à travers le pays des Chalybes. C’est le plus belliqueux des peuples chez lesquels on passa. Il fallut en venir aux mains. Ils portaient des corselets de lin descendant jusqu’à la hanche. Au lieu de basques, beaucoup de cordes entortillées tombaient du bas de ces corselets. Ils avaient aussi des jambières, des casques, et, à la ceinture, un petit sabre, dans le genre du poignard lacédemonien, dont ils égorgeaient les prisonniers qu’ils pouvaient faire ; après quoi, ils leur coupaient la tête et marchaient en la portant. Ils chantaient, ils dansaient, dès qu’ils étaient en vue de l’ennemi. Ils portaient aussi une pique longue d’environ quinze coudées et armée d’une seule pointe. Ils se tenaient dans leurs forts ; puis, quand ils voyaient les Grecs passés, ils les poursuivaient en combattant sans cesse : ils se retranchaient ensuite dans des lieux fortifiés, où ils avaient transporté toutes leurs provisions, en sorte que les Grecs, n’en trouvant pas, vécurent des bestiaux pris aux Taoques. Les Grecs arrivent ensuite au fleuve Harpase, large de cinq plèthres ; puis ils font vingt parasanges en quatre étapes à travers le pays des Scythins, dans une plaine semée de villages, où ils séjournent trois jours et se munissent de vivres.

Après avoir fait vingt parasanges en quatre étapes, on arrive à une ville grande, florissante et peuplée : elle se nomme Gymnias. Le chef du pays envoie un guide aux Grecs pour les conduire sur le territoire de ses ennemis. Celui-ci vient et leur dit qu’il les conduira en cinq jours à un lieu d’où ils découvriront la mer ; s’il ment, il consent à être mis à mort. Il conduit, en effet, l’armée, et, dès qu’il l’a fait entrer sur le territoire ennemi, il l’engage à tout brûler et ravager : ce qui prouva bien qu’il n’était venu que pour cela, et non par bienveillance pour les Grecs. On arrive le cinquième jour à la montagne sacrée. Cette montagne se nomme Théchès. Quand les premiers eurent gravi jusqu’au sommet et aperçu la mer, ce furent de grands cris. En les entendant, Xénophon et l’arrière-garde s’imaginent que l’avant-garde est attaquée par de nouveaux ennemis : car la queue était poursuivie par les gens dont on avait brûlé le pays.