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hoplites, mais il envoie ses cavaliers à Mantinée, en leur demandant de ne point se laisser abattre et en leur annonçant qu’ils trouveront probablement hors des murs de Mantinée tous les troupeaux et tous les habitants, vu que c’était le temps de la moisson. Les cavaliers partent.

Cependant la cavalerie athénienne partie d’Éleusis avait pris le repas du soir à l’isthme, et, après avoir traversé Cléones, elle était arrivée sur le territoire de Mantinée et s’était cantonnée dans les maisons en dedans des murailles. Quand on a connaissance de l’approche des ennemis, les Mantinéens prient les cavaliers athéniens de les secourir autant que possible. Ils leur montrent dans les champs tous leurs troupeaux, leurs ouvriers, un grand nombre d’enfants et de vieillards de condition libre. Les Athéniens, en les entendant, se mettent en campagne, quoique à jeun, eux et leurs chevaux. Qui n’admirerait la valeur qu’ils déployèrent en cette circonstance ? Bien qu’ils voient des ennemis beaucoup plus nombreux, et que leur cavalerie ait éprouvé un échec à Corinthe, ils ne se laissent point arrêter par ces considérations, ni par la pensée qu’ils vont combattre des Thébains et des Thessaliens, réputés la meilleure cavalerie ; mais rougissant à l’idée que leur présence ne serait d’aucune utilité à leurs alliés, ils s’élancent aussitôt qu’ils aperçoivent l’ennemi, désireux de sauver l’honneur de leur patrie ; et ce fut à leur bravoure que les Mantinéens durent de conserver tout ce qu’ils avaient dans la campagne. Les Athéniens perdent quelques braves et en tuent évidemment à l’ennemi. Car il n’y avait pas d’arme si courte avec laquelle les deux partis ne pussent s’atteindre réciproquement. Ils enlèvent leurs morts, et rendent les corps de quelques ennemis sous la foi d’une convention.

Cependant Épaminondas, considérant qu’il va être obligé de partir sous peu de jours, parce que le temps fixé pour l’expédition tirait à sa fin, sent que, s’il laisse sans défense les États au secours desquels il est venu, ils seront assiégés par leurs adversaires ; il comprend que lui-même verra sa réputation complètement perdue, pour avoir été vaincu à Lacédémone avec sa nombreuse infanterie par une poignée d’hommes, vaincu à Mantinée dans un combat de cavalerie, et qu’il a été, par son expédition dans le Péloponèse, la cause de la ligue formée par les Lacédémoniens, les Arcadiens, les Achéens, les Éléens et les Athéniens. Aussi lui semble-t-il impossible de partir sans combat, quand il réfléchit que, s’il est vainqueur,