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mien ? Mais, par Jupiter ! dira-t-on, il est venu librement. Eh quoi ! celui qui l’aurait tué loin de votre ville aurait mérité des éloges, et maintenant qu’il est revenu pour augmenter le nombre des maux qu’il vous a déjà faits, on pourrait dire qu’il n’a pas mérité son sort ? Où me montrer chez les Grecs des traités qui favorisent les traîtres, les déserteurs ou les tyrans ? Rappelez-vous, d’ailleurs, que vous avez décrété l’extradition des bannis entre tous les États alliés. Peut-on dire qu’il n’a pas mérité la mort, le banni qui rentre dans sa patrie sans une décision générale des alliés ? Pour moi, je prétends, citoyens, que, si vous me mettez à mort, vous aurez vengé votre plus grand ennemi ; mais que, si vous proclamez la justice de ma conduite, vous aurez vengé, aux yeux de tout le monde, vos propres injures et celles de tous vos alliés. »

Les Thébains, après avoir entendu ce discours, décrètent qu’Euphron a subi le sort qu’il mérite. Ses concitoyens[1] cependant emportent son corps comme celui d’un homme de bien, et l’enterrent sur l’agora, où ils le révèrent comme fondateur de leur ville[2]. Ainsi, ce semble, le gros des hommes donnent à leurs bienfaiteurs le nom de gens de bien.


CHAPITRE IV.


Expédition des Athéniens à Orope. — Alliance des Athéniens et des Arcadiens. — Paix particulière de Corinthe. — Guerres des Arcadiens et des Éléens. — Défaite des Lacédémoniens, alliés des Éléens. — Troubles pendant les jeux olympiques. — Dissensions intérieures en Arcadie.


(Avant J. C. 366, 365, 364, 363.)


Voilà ce que j’avais à dire sur Euphron. Je reprends maintenant mon récit où je l’avais laissé. Les Phliasiens étaient encore à fortifier Thyamia, et Charès se trouvait encore auprès, d’eux, lorsque les exilés s’emparent d’Orope[3]. Tous les Athéniens marchent alors contre cette place, et font venir Cha-

  1. Les Sicyoniens.
  2. Littéralement archégète, chef suprême.
  3. Thémison et Théodore d’Eubée s’étaient emparés d’Orope, ville alliée des Athéniens, sur les frontières de la Béotie et de l’Attique. Les citoyens, exilés à cette époque, rentraient alors dans leur patrie. — Cf. Thucydide, VIII, xcv.