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ceux qui sont choisis se trouvent Callias, fils d’Hipponicus, Autoclès, fils de Strombichide, Démostrate, fils d’Aristophon, Aristoclès, Céphisodote, Mélanope et Lycanthe. Quand ils paraissent devant l’assemblée des Lacédémoniens et des alliés, l’orateur Callistrate s’y trouvait aussi. Il avait promis à Iphicrate que, s’il le laissait aller, il lui enverrait de l’argent pour la flotte ou ferait faire la paix : il était ainsi à Athènes à négocier pour la paix. Lors donc que les députés sont admis devant l’assemblée des Lacédémoniens et des alliés, le porte-flambeau[1] Callias prend le premier la parole. C’était un homme qui ne se plaisait pas moins à s’entendre louer par lui-même que par les autres. Il commence donc à peu près ainsi :

« Citoyens Lacédémoniens, ma proxénie avec vous ne date pas de moi seulement, mais le père de mon père l’a léguée à notre famille. Je veux aussi vous montrer de quels sentiments notre patrie est animée envers nous. En temps de guerre, elle nous choisit pour stratéges, et, quand elle désire la paix, elle nous envoie pour la conclure. Moi-même je suis venu deux fois jadis pour terminer la guerre, et, dans ces deux députations, je suis parvenu à opérer la paix entre vous et nous. Maintenant je viens pour la troisième fois, et je pense avoir aujourd’hui des raisons bien plus justes pour obtenir une réconciliation.

« Je trouve, en effet, que vos sentiments sont les mêmes que les nôtres, mais que vous êtes fâchés comme nous de la destruction de Platée et de Thespies. Comment n’est-il donc pas naturel que ceux qui partagent les mêmes sentiments soient plutôt amis qu’ennemis les uns des autres ? Et certes, c’est le propre des gens sensés d’éviter de commencer une guerre, lors même qu’il y a quelques légers sujets de différend. Si donc nous étions d’accord, ne serait-il pas tout à fait étrange que nous ne fissions pas la paix ? La justice nous défendait de porter jamais les armes les uns contre les autres, puisqu’on dit que les premiers étrangers auxquels Triptolème[2], notre ancêtre, découvrit les mystères sacrés de Cérès et de Proserpine, furent Hercule, le père de votre race, ainsi que les Dioscures, vos concitoyens, et que le Péloponèse, le premier, reçut de lui les semences du fruit de Cérès. Comment donc serait-il juste que vous, vous vinssiez

  1. Il portait le flambeau dans les pompes sacrées d’Éleusis : c’était une des fonctions les plus honorées de la république.
  2. Voy. ce mot dans le Dict. myt. de Jacobi.