Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/58

Cette page a été validée par deux contributeurs.
xlvii
introduction.

elle s’assied en pleurant. Panthéa, au même instant, tire un poignard, dont elle s’était depuis longtemps munie, se frappe, et posant la tête sur la poitrine de son mari, elle expire. La nourrice, poussant des cris douloureux, couvre les corps des deux époux, comme l’avait recommandé Panthéa. Bientôt Cyrus apprend l’acte de Panthéa ; il arrive tout bouleversé, pour voir s’il peut encore la secourir. Les eunuques, voyant ce qui s’est passé, tirent tous les trois leurs poignards, et se percent dans l’endroit même où elle leur avait ordonné de se tenir. Cyrus, après avoir assisté à ce triste spectacle, s’en va pénétré de douleur et d’admiration pour Panthéa. Par ses soins, on rend aux morts les honneurs funèbres avec une très-grande pompe, et il leur fait élever un vaste monument. On dit que ce monument, érigé aux deux époux et aux eunuques, existe encore aujourd’hui, que sur une colonne élevée sont les noms du mari et de la femme écrits en caractères syriens, et que sur trois colonnes plus basses, on lit encore cette inscription : Porte-sceptres. »

Quelques critiques modernes d’un grand mérite ont contesté l’authenticité de l’Agésilas de Xénophon, bien que l’antiquité tout entière l’ait considéré comme une production de notre auteur. Il est fort difficile, selon nous, de trancher ces sortes de questions, où le pour et le contre se balancent souvent dans un parfait équilibre, et nous avons renvoyé, dans les notes qui accompagnent notre traduction, aux livres qui renferment les éléments de cette controverse. Quant à l’œuvre elle-même, on peut y voir la production d’une âme jeune, passionnée pour le bien, l’admirant dans un héros qu’elle croit la vertu vivante, et exprimant son enthousiasme naïf dans un style que la conviction émue ne préserve pas toujours de la recherche poétique ni de la prétention et de l’emphase familière aux rhéteurs. On y trouve cependant de beaux endroits ; et le récit de la bataille de Coronée, perdu, noyé pour ainsi dire dans l’Histoire grecque, s’y trouve reproduit dans un relief qui donne raison à l’éloge qu’en a fait Longin.