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leur donne en toute hâte des armes prises au portique, et on les conduit à l’Amphéion, avec l’ordre d’y demeurer l’arme au pied. Aussitôt, on fait crier par les hérauts à tous les Thébains, cavaliers et hoplites, qu’ils peuvent sortir, que les tyrans sont morts. Les citoyens, tant qu’il fait nuit, demeurent tranquilles sans vouloir y croire ; mais le jour venu, et le fait devenant évident, les hoplites et les cavaliers se joignent aussitôt en armes aux conjurés. Les exilés envoient des cavaliers à ceux qui sont sur les frontières athéniennes et aux deux généraux, qui arrivent dès qu’ils savent pourquoi on les appelle.

Cependant l’harmoste de l’Acropole, connaissant la publication de la nuit, envoie immédiatement chercher des secours à Platées et à Thespies. Mais les cavaliers thébains, informés de l’arrivée des Platéens, vont à leur rencontre et en tuent plus d’une vingtaine. Après ce succès, ils rentrent dans la ville, et, réunis aux Athéniens qui étaient déjà venus des frontières, ils attaquent l’Acropole. Ceux qui s’y trouvaient, sentant leur propre faiblesse, commencent à avoir peur en voyant l’ardeur des assaillants, excités encore par les récompenses brillantes promises à ceux qui monteraient les premiers à l’assaut[1] :

  1. Il existe un curieux exemple de ces récompenses, promises à qui montera le mieux à l’assaut, dans Quinte-Curce, VII, xi : « Prœmium erit ei, qui occupaverit verticem, talenta decem. Uno minus accipiet, qui proximus ei venerit, eademque ad decem homines servabitur portio. Certum autem habeo vos non tam liberalitatem intueri meam, quam voluntatem. » Voy. ce passage dans l’édition de Pitiscus, p. 534. On y trouve une note curieuse sur la proportion décroissante indiquée par les mots : « Eademque ad decem homines servabitur portio. » Les auteurs du Roman d’Alexandre n’ont pas laissé échapper une si belle occasion d’introduire dans leur poëme cette promesse du roi de Macédoine, et de composer les vers suivants, qui ont, selon nous, un certain intérêt archéologique :

    Vus, jouene baceler de pris et de desroi,
    Qui ames bêle dame et le rice donoi,
    Et desires sovent et gueres et tornoi ;
    Qui primes montera sur la roce, ce croi,
    Et de ma rice enseigue mostera le desploi,
    x marcs li donrai-je, je li plevis ma foi ;
    L’autres en ara ix, et li tiers viii, de moi,
    Li quars vii, li quins vi, ii sismes v, de moi,
    Li sesmes en ait iv, li vismes iii, ce croi ;
    Li neumes en ait ii, le dizme i, je l’otroi.
    Et cescun avera ceval et palefroi,
    De caus qui monteront le mur et le berfroi.

    Voici la traduction de ce passage : « Vous, jeunes bacheliers, dont la fortune est faite ou à faire, qui aimez belles dames et riches présents, et désirez souvent guerres et tournois ; le premier qui montera sur la roche,