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des excursions, est ravi de l’entendre ainsi parler : « Si tu l’ordonnes, dit-il. — Je l’ordonne, répond Agésilas, et je te prie d’annoncer à ces villes que, si tout va bien ici, nous reviendrons les voir, comme nous le leur avons promis. » Là-dessus Dercyllidas se dirige d’abord vers l’Hellespont, et Agésilas, traversant la Macédoine, arrive en Thessalie. Les Larisséens, les Cranoniens, les Scotuséens, les Pharsaliens, peuples alliés des Béotiens, ainsi que les Thessaliens qui ne se trouvaient pas alors en exil, le suivaient en inquiétant sa marche. Jusque-là son armée avait formé un carré long, la moitié de la cavalerie à la tête, l’autre moitié à la queue. Mais comme les Thessaliens chargent l’arrière-garde et arrêtent sa marche, il envoie en arrière toute la cavalerie de la tête, à l’exception de sa garde. Quand les deux armées sont en présence, les Thessaliens, trouvant dangereux de se hasarder avec de la cavalerie seulement contre des hoplites, se retirent au pas. Les autres continuent la poursuite avec de grandes précautions ; mais Agésilas, rachetant la faute qui se commettait des deux côtés, envoya les cavaliers vigoureux qui l’entouraient[1] avec l’ordre de se joindre aux autres et de poursuivre avec eux les ennemis avec la plus grande promptitude, sans leur laisser le temps de faire volte-face. Les Thessaliens, se voyant chargés à l’improviste, ne se retournent point pour la plupart ; ceux qui cherchent à le faire sont atteints au moment même où ils ont leurs chevaux à demi tournés. Cependant le Pharsalien Polycharme[2], commandant de cavalerie, fait volte-face et tombe avec les siens en combattant. Alors ce n’est plus chez les Thessaliens qu’une déroute désastreuse : les uns sont tués, les autres faits prisonniers, et les fuyards ne s’arrêtent que quand ils ont atteint le mont Narthacium. Alors Agésilas élève un trophée entre Pras et le Narthacium, et y demeure, enchanté de cet exploit, vu qu’avec des cavaliers recrutés par lui-même il avait battu le peuple qui est le plus fier de sa cavalerie. Le lendemain, il franchit les monts achéens de la Phthie, et n’a dès lors que des pays amis à traverser jusqu’aux frontières de la Béotie.

Il allait les franchir, quand le soleil se montre sous forme de lune[3]. On reçoit en même temps la nouvelle de la défaite des

  1. Schneider dit que c’étaient 300 cavaliers d’élite qui servaient d’état-major aux rois de Lacédémone. Cf. Thucydide, V, LXXII ; Hérodote, VIII, cxxiv.
  2. Weiske le nomme Polymaque.
  3. À cause d’une éclipse annulaire.