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je reviendrai au milieu de vous, pour achever ce que vous désirez. » En entendant ces paroles, plusieurs versent des larmes, et tous décident d’aller avec Agésilas au secours de Lacédémone ; puis, si tout se passe bien, de le reprendre pour chef et de revenir en Asie. Ils se préparent donc à l’accompagner. Agésilas laisse en Asie l’harmoste Euxène à la tête de garnisons fortes d’au moins quatre mille hommes, afin qu’il puisse garder les villes. Mais s’apercevant lui-même que la plupart des soldats ont plus envie de rester que de marcher contre des Grecs, comme il veut cependant emmener avec lui les meilleurs et les plus nombreux, il promet des prix aux villes qui enverront la plus belle armée, ainsi qu’aux lochages des mercenaires qui lui amèneront les loches les mieux armés, hoplites, archers et peltastes. Il fait aussi annoncer aux hipparques que celui qui présentera l’escadron le mieux monté et le mieux armé, il lui donnera un prix. Il ajoute que la distribution aura lieu en Chersonèse, après qu’on sera passé d’Asie en Europe, afin que l’on comprenne bien qu’il veut distinguer ceux qui doivent marcher avec lui. Les prix étaient pour la plupart des armes travaillées avec luxe, armes d’infanterie et de cavalerie : il y avait aussi des couronnes d’or. La valeur de tous ces prix n’était pas moindre de quatre talents. Malgré cette grande dépense, on consacra encore beaucoup d’argent à acheter des armes de toute espèce pour l’armée. Après avoir traversé l’Hellespont, il établit pour juges les Lacédémoniens Ménarque, Hérippidas et Orsippe, et un homme de chacune des villes alliées ; puis, après la distribution des prix, il s’avance, à la tête de son armée, par la même route qu’avait prise le roi[1], quand il marcha contre la Grèce.

Vers le même temps, les éphores décrètent une expédition. La ville, vu la jeunesse d’Agésilas, choisit Aristodème, parent et tuteur de l’enfant, pour la commander. Quand les Lacédémoniens ont passé les frontières, les ennemis rassemblés se réunissent pour délibérer sur la manière la plus favorable de livrer bataille. Le Corinthien Timolaüs prend la parole : « Il me semble, dit-il, alliés, que les Lacédémoniens ressemblent aux fleuves qui, près de leur source, sont peu considérables et faciles à passer, mais qui, à mesure qu’ils avancent, deviennent de plus en plus violents par la réunion des autres fleuves qui s’y jettent. De même, les Lacédémoniens, à leur point de

  1. Xerxès.